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UN SCANDALE DERRIÈRE LA RÉFORME DE LA PJ ?

Flash info 08/11/2022

UN SCANDALE DERRIÈRE LA RÉFORME DE LA PJ ? - Syndicat Unité Magistrats SNM FO

UNITÉ MAGISTRATS a réitéré lors de son audition du 3 novembre 2022 devant la mission d’information de la Commission des Lois du Sénat sur l’organisation de la police judiciaire les inquiétudes sur la réforme envisagée de la Police judiciaire que nous avions soulevées dans notre communiqué du 14 octobre 2022, Réforme de la PJ : Une réforme à contre temps et à contresens ?

Nous avions en effet relevé le risque de perte d'indépendance de la police judiciaire par rapport au Politique, en la faisant dépendre d'une Direction Départementale de la Police Nationale, elle-même sous autorité du Préfet, et écartant ainsi de facto l'autorité judiciaire pourtant compétente, en principe, pour désigner tel service d'enquête dans telle affaire.

L'affaire Dupuch, ou l'illustration criante du bien-fondé des craintes d'ingérence du Politique dans les enquêtes pénales.

Une affaire, récemment évoquée par le Parisien (article du 22 octobre 2022) reprise par le Canard enchaîné (article du 2 novembre 2022),  confirme de manière éclatante cette inquiétude : celle portant sur une fraude au concours des commissaires initialement révélée au mois de mai 2022 par le Parisien.

Dans le cadre de cette affaire, l'inspecteur général Dupuch est soupçonné d'avoir favorisé sa maîtresse, commandante de Police, au concours d'accès à la fonction de Commissaire de police, tous deux ayant été mis en examen au mois de mai dernier pour « fraude à un concours public ».

Au-delà du scandale de fraude entachant des cadres de la Police nationale, il est apparu que ce scandale pouvait en cacher un autre : la Sûreté départementale de Lille avait découvert la fraude présumée, dès le mois de janvier 2022, à l'occasion d'interceptions judiciaires ordonnées dans le cadre d'une affaire criminelle impliquant un frère de cette commandante de police.

Or, le juge d'instruction avait eu un retour de commission rogatoire et des écoutes téléphoniques le 29 mars 2022, sans aucune mention des conversations compromettantes entre la commandante de police et Frédéric Dupuch, le DDSP du Nord et la Commissaire de la SU s'étant ensuite « rejetés la balle » pour tenter de se dédouaner de cette carence de transmission.

Il n'en demeure pas moins que ce « traitement de l'information » par la DDSP a eu pour conséquence, une absence de remontée à l'autorité judiciaire pendant plusieurs mois, cette carence ayant conduit la magistrate en charge de l'instruction à interrompre les écoutes téléphoniques dès le mois de mars.

Des soupçons de pressions afin d'étouffer ou retarder la transmission de faits délictueux impliquant des Officiers de police judiciaire, auprès de l'autorité judiciaire, et des conséquences graves sur la manifestation de la vérité.

La juge d'instruction n'a été saisie de ces faits de fraude qu'au mois de mai 2022, soit 5 mois après que les enquêteurs en aient eu connaissance. Pendant ces quelques mois, les deux mis en cause ont eu largement le temps d'être informés des soupçons à leur égard, et faire disparaître des éléments de preuve.

Ainsi, la juge d'instruction du Tribunal judiciaire de Lille en charge du dossier s'est-elle étonnée du « retard » pris par le Parquet pour la saisir de ces faits remontant à plusieurs mois, conduisant, selon ce magistrat instructeur, « à s'interroger sur l'existence de pressions exercées sur les enquêteurs chargés de ma commission rogatoire de la part de leur hiérarchie afin de retarder ou d'empêcher la transmission de ces informations ».

« Depuis, c'est panique à Beauvau. La justice veut savoir qui a tenté de sauver le soldat Dupuch » (le Canard enchaîné, 2 novembre 2022).

Cette affaire illustre la problématique des « remontées officieuses » d'informations, dans les dossiers sensibles, et de manière totalement opaque, en marge des communications Justice/Police.

La réorganisation envisagée de la Police judiciaire, en centralisant les forces de police sous une unique direction départementale, elle-même dépendante du Préfet, ne pourra que contribuer à aggraver sensiblement les dérives déjà ponctuellement constatées.

Il est remarquable que l'affaire en question concernait précisément l'inspecteur en charge de la controversée réforme de la Police judiciaire !

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