COMMUNIQUE - BUDGET JUSTICE : DES AVANCÉES, DES INTERROGATIONS, UNE VIGILANCE
BUDGET JUSTICE : DES AVANCÉES, DES INTERROGATIONS,
UNE VIGILANCE
UNITE MAGISTRATS a été entendu à l’Assemblée nationale le 27 octobre et au Sénat le 7 novembre dans le cadre de l’examen des missions « Justice » du projet de Loi de finances (PLF) 2026.
Le projet prévoit 10,7 milliards d’euros de budget pour la mission Justice en 2026 soit une hausse de 210 millions d’euros par rapport à la loi de finances 2025 (+ 2 %) dont dont 10,63 milliards d’euros au titre des crédits du budget général et 70 millions au titre des prévisions de recettes de taxes.
Unité Magistrats a rappelé ses positions et formulé des propositions concrètes sur plusieurs thématiques essentielles.
Si certaines mesures témoignent d’un souci de cohérence et de réalisme, la vigilance demeure indispensable.
Des propositions Unité Magistrats de bon sens enfin retenues
Unité Magistrats se félicite de constater que plusieurs de ses propositions ont été reprises dans le projet de loi.
Suppression de certaines expertises obligatoires (article 78)
L’article 78 prévoit la suppression de certaines obligations légales d’ordonner des expertises en matière pénale. Cette évolution, trop souvent analysée sous le seul prisme budgétaire, traduit en réalité un retour salutaire au principe du pouvoir souverain du juge dans la conduite de l’instruction.
Unité Magistrats plaide depuis longtemps pour la levée de toute obligation légale en la matière, afin que le magistrat conserve l’entière maîtrise, à l'issue du processus contradictoire, de l’opportunité des mesures d’investigation.
Création d’un droit de timbre pour les procédures civiles
Longtemps défendue par Unité Magistrats, l’instauration d’un droit de timbre pour la saisine des juridictions non pénales (hors bénéficiaires de l’aide juridictionnelle) répond à une exigence de responsabilité collective. Comme le souligne la CEPEJ, la France demeure l’un des rares États européens à ne pas associer le justiciable aux coûts de fonctionnement de la justice.
Le montant raisonnable retenu – 50 euros – contribuerait à prévenir les recours abusifs tout en préservant l’accès équitable aux tribunaux.
Frais d’enquête à la charge des condamnés (article 46)
Si le principe peut sembler légitime, Unité Magistrats appelle à la plus grande prudence.
Avant toute mise en œuvre, l’État doit d’abord démontrer sa capacité à recouvrer efficacement les amendes et aides juridictionnelles indues.
L’indemnisation des victimes doit, de surcroît, demeurer la priorité absolue.
Enfin, une telle charge ne saurait entraver la réinsertion des condamnés, sauf en matière de criminalité organisée ou financière.
Au-delà de ces ajustements, Unité Magistrats regrette que la question des frais de justice ne soit toujours pas abordée dans une perspective globale intégrant notamment l’usage raisonné de l’intelligence artificielle (par exemple pour la transcription des écoutes téléphoniques) et la rémunération adaptée des avocats intervenant dans des contentieux sériels.
Unité Magistrats reste Vigilant sur la réalité des moyens
L’augmentation annoncée des effectifs
Elle ne saurait masquer les failles persistantes du service public de la justice. Les objectifs fixés par la Loi d’orientation et de programmation de la justice (LOPJ) ne sont pas atteints :
|
Prévu LOPJ |
Réalisé |
Déficit |
|
|
Attachés de justice |
190 |
21 |
-169 |
|
Magistrats |
315 |
286 |
-29 |
Ces retards traduisent une politique de renoncement dont les conséquences se font sentir dans chaque juridiction.
Recrutement, diversité et égalité : réaffirmer l’exigence républicaine
Unité Magistrats exprime, une fois encore, sa profonde inquiétude face à :
• L’appauvrissement du concours professionnel, réduit à une seule note de synthèse ;
• La marginalisation des préparations publiques (IEJ) au profit de formations privées onéreuses ;
• Les biais de reproduction sociale qu’engendrent ces évolutions.
Fidèle à ses valeurs d’égalité, de pluralisme et d’indépendance, Unité Magistrats réaffirme qu’un concours véritablement républicain, exigeant et équitable, demeure la seule voie légitime d’accès à la magistrature.
Gels budgétaires
Les effets délétères des gels budgétaires Les restrictions successives ont eu des effets désastreux :
• Magistrats honoraires écartés faute de crédits pour leurs vacations ;
• Équipes judiciaires désorganisées et postes non renouvelés ;
• Experts non rémunérés ou payés avec de longs retards, paralysant certaines procédures.
Ces à-coups budgétaires déstabilisent les juridictions, alourdissent la charge des magistrats et aggravent les délais d’audiencement. Unité Magistrats appelle à une sanctuarisation durable des budgets de fonctionnement.
Bâtiments et conditions de travail : un impensé persistant
Nos nombreuses visites de terrain révèlent une dégradation préoccupante des conditions matérielles : bureaux partagés entre magistrats, greffiers et stagiaires, atteintes à la confidentialité, manque chronique de salles d’audience et défaillances des dispositifs de sécurité.
Alors que les recrutements massifs de la « génération historique » n’ont pas été anticipés, il est urgent de faire du bâtimentaire une priorité nationale.
L’informatique : progrès incertains, risques réels
Malgré certains progrès, les outils numériques demeurent souvent obsolètes, redondants ou inadaptés.
Les plans de continuité d’activité sous-estiment les risques électriques et cyber. Une véritable stratégie de modernisation doit faire primer l’efficacité sur la simple multiplication des dispositifs.
Une ligne claire : pragmatisme, pluralisme et exigence
Force de propositions et attachée à une justice digne, efficace et accessible, Unité Magistrats continuera de soutenir les réformes courageuses et d’en initier de nouvelles, dans l’unique intérêt du service public de la justice.