Prime exceptionnelle COVID 19 : Le casting des primés va commencer !
Flash info 01/07/2020
Par un décret du 14 mai 2020, les magistrats de l'ordre judiciaire ont, parmi d'autres agents de la fonction publique, caressé l'espoir d'une potentielle reconnaissance financière de leur particulière mobilisation pendant l'état d'urgence sanitaire. Une prime exceptionnelle exonérée d'impôt sur le revenu et de cotisations et contributions sociales d'un montant maximum de 1000 euros pouvait ainsi leur être octroyée.
Un vent de philanthropie a aussitôt soufflé à la DSJ. Une "réunion d'échanges" avec les organisations syndicales était organisée, en urgence, le 19 juin dernier pour nous permettre de mesurer la générosité et l'empathie de notre Ministère pour ses agents qui ont assuré, en dépit des circonstances, la continuité de l'activité.
Rappelons qu'UNITÉ MAGISTRATS est le seul syndicat de magistrats à avoir réclamé le versement d’une prime exceptionnelle aux magistrats, dès le 16 avril 2020, et avant même la parution du décret. Nous attirions déjà l'attention de notre Ministère sur la nécessaire transparence des critères d'éligibilité et de répartition.
Comme à l'accoutumée, la DSJ a souverainement interprété le décret instaurant la prime exceptionnelle et confondu une réunion d'échanges avec une transmission d'information unilatérale. Tout était déjà joué d’avance. Nos questions, suggestions ou contre-propositions ont été balayées d'un revers de manche.
La note DSJ du 25 juin 2020 a ainsi été diffusée en l’état aux chefs de Cour ; les modalités d'application et les conditions d'octroi de la prime ne répondant qu’à un seul objectif : le respect d’enveloppes budgétaires strictement contraintes.
Aucune information n'a néanmoins été transmise par le DSJ sur le montant exact de ces enveloppes, ni sur leur péréquation entre les Cours d'appel, ni sur le budget global alloué au Ministère pour financer cette dépense et encore moins sur sa répartition entre ses directions. Quant au nombre de magistrats et fonctionnaires potentiellement éligibles à la perception de cette prime, il est, lui aussi, demeuré inconnu. Avec autant de questions restées en suspens, UNITÉ MAGISTRATS ne peut que s'interroger sur les raisons d'un tel mystère et sur les conséquences prévisibles d'une telle opacité.
Il est parfaitement évident que la note du 25 juin aboutira à des discordances d'application entre les cours d'appel et ouvrira la voie à des inégalités de traitement entre les magistrats.
La DSJ nous offre ainsi pour le déconfinement, sa nouvelle boîte de Pandore avec une interprétation du décret du 14 mai 2020 uniquement guidée par un souci d’économies mal venu.
Alors qu'UNITÉ MAGISTRATS réclamait un versement identique de 1000 euros au bénéfice de tous les agents éligibles à la prime, trois taux sont retenus sur trois périodes de présence entre le 23 mars et le 11 mai 2020. Exit donc pour la DSJ le cas des collègues qui se sont exposés aux risques en présentiel, avant et après cette période de "référence" auto-décrétée.
Si vous étiez présents :
- de 15 jours à 20 jours inclus : prime de 330 euros
- de 21 à 27 jours inclus : prime de 660 euros
- plus de 28 jours : prime de 1000 euros
Pourquoi faire simple lorsque l'on peut faire compliqué ? A ces critères objectifs de temps en présentiel s'ajoutent d'autres critères d'attribution, eux totalement subjectifs, qui sous la plume inspirée de la DSJ s’analysent en termes de restriction, voire d'exclusion.
Il s'agira en effet "d'attribuer prioritairement la prime à des personnes ayant exercé principalement en présentiel et qui se seront investies de manière substantielle dans des conditions manifestant un engagement a minima significatif ayant permis la continuité de l'activité juridictionnelle ou administrative…"
Pour s'assurer d'une parfaite compréhension des chefs de Cour et de juridiction du sens de cette formulation, des exemples savoureux sont proposés en florilège : l'investissement doit être « particulier » et la mission « essentielle », la contribution doit être « significative » autant que devra l'être l'accomplissement d'une mission ou d'une activité hors temps normal, l'exercice des missions doit être "accrue" et évidemment, la charge « supplémentaire » doit s'étendre au-delà de la charge habituelle de travail.
Nous ignorons d'ailleurs si ces critères sont cumulatifs ou alternatifs.
Si vous n'atteignez pas ces objectifs, point de prime même si vous étiez présent plus de 28 jours. Et si par extraordinaire, vous réalisez cet exploit, la DSJ veille à ses deniers. La prime de 1000 euros ne peut être versée "qu'aux personnes qui auront assuré durant toute la période une participation à l'activité manifestée par un surcroît particulièrement notable de travail". Elle doit en tout état de cause revêtir un caractère exceptionnel". Nous soulignons le tempo crescendo du vocabulaire employé dont les termes, pour qualifier l'intensité du travail devant avoir été accompli, traduisent au final, une regrettable mesquinerie.
L'interprétation à géométrie variable de termes généraux et invérifiables est à redouter autant que l'arbitraire qu'elle peut supposer.
Les modalités d'attribution de cette prime exceptionnelle tombent dans les travers de la prime modulable dont UNITÉ MAGISTRATS a constamment dénoncé l’opacité et l’arbitraire. Notre syndicat réclame toujours l'intégration de cette prime dans le traitement des magistrats par une majoration générale de celui-ci de 12%.
La priorité étant donnée par la DSJ pour l'octroi de la prime exceptionnelle au "substantiel présentiel notablement significatif", UNITÉ MAGISTRATS déplore en outre, qu'aucun critère n'ait été défini pour les magistrats ayant effectué un travail à distance. Leur sort est laissé à la discrétion des chefs de Cour. Quant à la situation des magistrats dont l'activité s'est réalisée pour partie en présentiel et pour partie en travail à distance, elle n'est même pas envisagée.
Certes, le dévouement au service public ne se monnaie pas. Mais le montant de la prime et les conditions de sa répartition témoignent bien plus du mépris de l'Administration envers ceux qui ont assuré la continuité de la mission de justice que de la reconnaissance qui leur est due.
Dans tous les cas, et au risque de contrarier la vision idyllique de la DSJ sur la mise en œuvre de ces dispositions, chaque magistrat pourra contester devant les juridictions administratives compétentes, le montant de la prime qui lui a été alloué si celui-ci est inférieur à son engagement pendant la crise sanitaire.
UNITÉ MAGISTRATS vous apportera son soutien.
UNITÉ MAGISTRATS a réclamé, dès maintenant, à la DSJ, qu'un bilan exhaustif soit communiqué sur les montants alloués par Cour d'appel, sur leur répartition entre les agents et sur les critères d'octroi retenus par les chefs de Cour.
Retrouvez les précédents communiqués d'UNITÉ MAGISTRATS sur ce sujet :