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Gestion des ressources humaines de la magistrature : Bouquet final ou changement dans la continuité ?

Carrière 15/07/2020

Gestion des ressources humaines de la magistrature : Bouquet final ou changement dans la continuité ?  - Syndicat Unité Magistrats SNM FO

Le « Guide des parcours professionnels dans la magistrature »

Au lendemain de la publication d’une transparence tout aussi discutable que les précédentes, à quelques heures de la désignation du futur Garde des Sceaux, et à la veille d’une réunion dite de « concertation », la DSJ n’a rien trouvé de plus urgent que l’envoi aux organisations syndicales représentatives d’un « Guide des parcours professionnels dans la magistrature » (en pièce jointe).

Ce document de près de 70 pages (!!) est un chef-d’œuvre de faux-semblants technocratiques. Si l’on dépasse le brevet d’autosatisfaction qui transparaît à longueur de page en filigrane, la phraséologie ministérielle même assaisonnée de diagrammes multicolores, ne convaincra que ses rédacteurs.

La note jointe à ce guide, en donne une première clé de lecture. A défaut de bilan tiré de la nécessaire remise à plat de la gestion des ressources humaines qui devait constituer le 6ème Chantier de la Justice, la DSJ se contente d’un rappel de la place centrale des chefs de cour et juridiction dans l’ensemble du dispositif dont on ne voit guère l’intérêt. Car au-delà des propos lénifiants, nombre d’entre eux auront surtout en mémoire, les demandes de moyens maintes fois présentées et demeurées lettre-morte au nom d’une CLE immuable définie sur la seule base des crédits chichement accordés par Bercy.

Face au mécontentement grandissant, pour ne pas dire à la colère, des magistrats excédés par la multiplication de nominations aussi erratiques qu’incompréhensibles, la DSJ recentre son discours sur un prétendu « accompagnement des parcours professionnels ». Cette terminologie qui pourrait suggérer un véritable dialogue recouvre en réalité uniquement des entretiens à l’issue desquels la DSJ ne s’engagera à rien et continuera à œuvrer selon sa bonne habitude dans la plus totale opacité. Et ce ne sont pas les « entretiens de carrière » soudainement ressortis des tiroirs qui y changeront quoi que ce soit. Celles et ceux d’entre nous qui se sont prêtés à cet exercice en ont vite compris l’inutilité. Même si l’échange est fort courtois et parfois utile en termes de recommandations, il n’aboutit à aucune offre de poste.

En un mot, la DSJ, au lieu de proposer à chaque magistrat un déroulement de carrière pluriannuel assorti de diverses options géographiques et fonctionnelles, entend continuer à exercer un pouvoir discrétionnaire sur la carrière de chaque magistrat.

La DSJ dispose, en effet, de deux leviers auxquels elle ne renoncera sous aucun prétexte.

Il n’est nulle part envisagé de mettre fin à cette pratique surréaliste qui oblige chaque magistrat sollicitant une mutation ou un avancement, à former des desiderata en aveugle sans savoir si le poste est vacant ou même susceptible de l’être.

De plus, les critères théoriquement utilisés pour la sélection des candidats (ancienneté, situation familiale…) et tels que définis dans la note SJ-17-387-RHM1 du 22/11/2017 ne sont ni hiérarchisés ni priorisés. La DSJ a donc toute latitude pour sélectionner tel critère plutôt que tel autre à sa convenance voire à défaut d’invoquer une règle non écrite et qui lui est propre !

C’est, sans doute, pour cette raison que le processus d’élaboration de la, si mal nommée « transparence », est schématisé à la page 40 du guide par une sinusoïdale décrivant parfaitement tous les méandres que doit suivre une nomination…

Aucun changement n’est davantage à espérer pour l’accès à la Hors Hiérarchie auquel le guide consacre à peine trois paragraphes en visant les dispositions textuelles en vigueur.

UNITÉ MAGISTRATS rappelle sa revendication constante de la dissociation du grade et de l’emploi qui ne ferait plus ainsi dépendre l’accès à l’échelon sommital de l’exercice de fonctions limitativement prédéfinies.

Ainsi cette note et ce guide apparaissent bien pour ce qu’ils sont : un écran de fumée destiné à masquer un refus constant de faire coïncider les besoins des juridictions avec les attentes des magistrats en se fondant sur des critères tangibles et objectifs.

« La règle des trois ans »

Pour couronner le tout, la DSJ décide subitement de généraliser la règle dite « des 3 ans » à tous les magistrats à compter du 1er janvier 2021. En clair, cette durée minimale d’exercice des fonctions avant toute mobilité qui s’applique déjà aux chefs de juridiction, aux magistrats nommés pour la 1ère fois hors hiérarchie et qui a été étendue aux primo nominations, concernerait désormais la totalité du corps.

La DSJ a organisé, le 7 juillet 2020, une « réunion de concertation » avec les organisations syndicales pour évoquer la mise en œuvre de cette nouvelle règle. Comme à l’accoutumée, la pratique du dialogue social dans notre Ministère consiste à nous exposer ce qui est déjà décidé par avance…

Nous n’avons pas manqué de relever que le guide des parcours professionnels envoyé la veille, mentionne en effet à sa page 43 la règle des 3 ans applicable à tous les magistrats nommés à compter du 1er janvier 2021 comme définitivement acquise. Pour les premières nominations, des dérogations seront admises pour raison familiale ou médicale grave (séparation d’avec un enfant mineur, éloignement du domicile familial, changement de situation matrimoniale ou de couple, pathologie avérée …). On peut s’interroger sur l’intérêt d’un principe auquel il est nécessaire d’apporter immédiatement des exceptions.

De plus, quels que soient les tempéraments fixés par la DSJ, leur application restera soumise à sa subjective interprétation, à son pouvoir discrétionnaire et à sa capacité d’attentisme. Les réunions préparatoires de transparence sont une parfaite illustration des contradictions et incohérences de la DSJ dans l’interprétation à géométrie variable de ses propres critères, auxquels elle n’hésite pas à apporter « des dérogations aux dérogations ».

Au lieu de remédier à l’ampleur des mouvements qui concerne chaque année plus du quartdu corps des magistrats, la DSJ fait le choix de recourir à un procédé qui limitera mécaniquement les possibilités de mutation ou d’avancement.

D’où la question que nous posions en titre de ce communiqué et qui reste ouverte : le Ministère de la justice va-t-il enfin se doter d’une véritable gestion des ressources humaines transparente et efficace ?

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