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Unité Magistrats FO

Stupéfiants : constat d'impuissance ?

Flash info 24/10/2017

Stupéfiants : constat d'impuissance ?  - Syndicat Unité Magistrats SNM FO

La mission d'information relative à l'application d'une procédure d'amende forfaitaire au délit d'usage illicite de stupéfiants a entendu FO-Magistrats le 28 septembre 2017. Notre syndicat a fait part aux rapporteurs de son opposition à une éventuelle amende forfaitaire, qui ne ferait qu’entériner – pour le pérenniser et le consolider – l’échec de la loi du 30 décembre 1970.

Depuis le vote de cette loi, le nombre de procédures traitées par les services de police et la justice a été multiplié par 50. La politique de lutte antidrogue, qui n’a pu enrayer l’explosion du phénomène, est donc un fiasco. Les statistiques montrent que, depuis les années 2000, la priorité a été donnée à la répression de la demande (les consommateurs), au détriment de la répression de l’offre (trafiquants et revendeurs), sans résultat probant. Les objectifs de la loi de 1970 ont été perdus de vue puisque les injonctions thérapeutiques ont été largement dépassées par les « rappels à la loi » (qui ne sont qu’un classement sans suite avec avertissement) et les peines pécuniaires. De toute façon, le contentieux de masse que représente la poursuite des ILS rend illusoire tout traitement sur mesure.

En fin de compte, la synergie entre les système répressif et le système de santé n’a pas été à la hauteur des enjeux. L’amende forfaitaire enterrerait la loi de 1970 sans avoir besoin de déclarer préalablement son décès ni de lui chercher une héritière. Elle satisferait les services de police et les parquets, débarrassés d’un contentieux hors contrôle, tout en maintenant l’illusion que l’interdit légal a été maintenu. En réalité, l’amende forfaitaire symbolisera avant tout le renoncement à une politique de santé publique. Elle permettra peut-être aussi d’augmenter les recettes budgétaires si la consommation de drogues continue de s’étendre, ce qui est probable. Bercy figurera donc également sur la liste des administrations pleinement satisfaites du projet.

FO-Magistrats considère par conséquent que l’instauration d’une amende forfaitaire est le type même de la fausse bonne idée, qui dissimule le renoncement envers toute politique pénale et toute politique de santé publique.

Il convient au contraire de tirer la leçon de l’échec patent de la loi de 1970. La distribution des soins sous contrainte pénale n’a pas permis à la justice de garder le contrôle d’un phénomène – la toxicomanie – qui est devenu un fléau de masse. Le positionnement des services de santé publique dans le sillage de la justice a conduit à une perte de responsabilité des pouvoirs publics qui ont renoncé à faire de la lutte contre l’addiction aux produits illicites une priorité de santé publique.

FO-Magistrats préconise par conséquent :

•             De remplacer la loi de 1970 en instaurant une nouvelle politique pénale de l’usage simple de drogues, car une pénalité faible, voire inexistante dans la pratique, est impuissante à maintenir la notion d’interdit chez les consommateurs et est devenue un obstacle à la prise en compte de la toxicomanie comme une responsabilité première des pouvoirs publics en termes de santé publique;

•             De réviser profondément la politique pénale des parquets en les orientant principalement vers la répression de l’offre de drogues (trafics, vente et revente);

•             De revoir dans les mêmes conditions les priorités des services de police et de gendarmerie;

•             D’introduire dans le code de procédure pénale une disposition permettant une retenue des usagers pour audition par les OPJ afin d'alléger la procédure pénale applicable à la garde à vue;

•             D’introduire dans le code pénal une circonstance aggravante pour toute infraction commise sous l’emprise de substance stupéfiante dont la cession est illicite, en vue de se procurer une telle substance ou en lien avec la possession ou l’usage d’une telle substance;

•             De faire de la lutte contre les drogues une priorité visible de la politique de santé publique.

 

La contribution de FO Magistrats remise aux rapporteurs de la mission d'information est en pièce jointe

 

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